Soundmorphosis
a propos
L’art de Paolo Scoppola se compose de grands espaces interactifs dont les images et les sons sont générés par des systèmes numériques complexes qui analysent les mouvements des gens et créent du contenu basé sur leurs gestes. Dans de nombreux cas, ce sont les visiteurs ordinaires d’un environnement d’exposition qui génèrent le contenu; dans d’autres, c’est la performance d’un musicien, d’un danseur ou d’un acteur qui traduit des gestes en contenu. Dans d’autres cas encore, l’installation se compose de musique, de photographies, de films et d’autres matériaux préexistants qui sont modifiés, moment par moment, par les gestes du corps humain. L’élément commun à toutes ces formes de
créativité est l’indétermination.
L’oeuvre n’est plus un film ou une mélodie, mais l’expérience unique et irremplaçable de jouer avec un contenu physiquement lié aux mouvements de son propre corps. En ce sens, on peut faire référence à des installations qui deviennent des performances
et vice versa. Personne, en effet, ne passe inaperçu dans l’espace interactif créé par l’artiste : chaque geste crée instantanément du contenu. Contrairement à cela, un artiste dans un espace interactif
n’est plus seulement une personne, mais à travers les images et les sons qu’il génère, il amplifie sa présence et devient une installation vivante.
Paolo Scoppola redéfinit donc les concepts d’image et de son, les introduisant dans le processus cognitif, créant un tourbillon continu où les stimuli perceptuels sont modifiés par le même sujet qui les reçoit. Il n’y a plus de séparation entre le monde extérieur et le monde intérieur; le seul élément qui reste immobile dans cette danse sans fin est l’esprit humain et les significations qu’il donne à ce qui l’entoure.
Un autre élément fondamental dans le travail de l’artiste, est le développement des outils pour créer l’oeuvre elle-même. Paolo Scoppola, en fait, crée entièrement le logiciel pour ses installations en écrivant le code ligne par ligne, comme dans une sorte de partition ouverte, où l’artiste définit les règles du jeu, mais laisse aux autres le soin de conclure la mélodie.
L’indétermination de ses oeuvres est en fait la conséquence de cette approche.
Des aspects techniques les plus profonds l’artiste émerge constamment pour mettre l’être humain toujours en avant la technologie. L’ordinateur n’est qu’un moyen, quoique complexe. Le désir demeure celui des artistes du XXe siècle : découvrir de nouveaux langages pour découvrir de nouvelles dimensions de
l’être humain, raconter le contemporain à travers la sensibilité de l’artiste. Dans ses installations, dans ses performances, en effet, il y a toujours un fort désir d’entrer dans la sphère des émotions et de le faire ressortir la fragilité de l’être humain.
CV
Artiste multidisciplinaire, diplômé en informatique et chargé de cours en design d’interaction à l’Institut de design avancé de Quasar à Rome, Paolo Scoppola crée des installations, des spectacles musicaux, de danse et de théâtre, dans lequel le corps humain, les images et les sons interagissent entre eux pour créer de nouveaux langages expressifs. Né à Rome en 1971, il a commencé sa carrière en 1998 en développant des applications de réalité virtuelle pour des entreprises italiennes tout en réalisant des reportages photo et des bandes sonores pour des documentaires et des spots télévisés. Puis, en 2008, le passage à des installations vidéo interactives avec la participation au Festival Spoleto. C’est le début d’un voyage qui l’a conduit à des expositions en Italie et à
l’étranger.
Il a collaboré avec des centres de recherche et des institutions scientifiques de niveau international, y compris l’Institut national de physique nucléaire, le Musée des sciences de Trente, le centre BRAIN pour
les neurosciences à Trieste, L’Université Kaust en Arabie Saoudite et l’Art Science Museum de Singapour. Il a participé à plusieurs campagnes publicitaires pour des marques internationales telles que Gore-Tex,
Barilla, Lines et Telecom. En 2016, il a remporté les Outdoor Industry Awards pour l’installation Meteomorphosis, créée avec l’agence Pescerosso pour Goretex Europa. Il a également réalisé des installations
pour des projets sur des enjeux mondiaux, comme « Sur les sentiers des glaciers » sur le changement climatique (Fabiano Ventura et Enel Green Power) et « Réduire » sur le gaspillage alimentaire (ministère de
l’Environnement).
À partir de 2017, il se produit avec le maestro Danilo Rea dans une série de concerts pour piano acoustique et images interactives, les conduisant à la création du spectacle musical interactif « Soundmorphosis » présenté pour la première fois en 2021 au MEET Digital Culture Center de Milan, qui est actuellement en tournée. Dès 2018, il a commencé à collaborer avec les chorégraphes Sarah Taylor et plus tard Valentina Moar avec qui il a créé en 2020 « Living Shapes » un spectacle de danse interactif présenté à Graz pendant le Festival La Strada 2020. De 2018, il a commencé à donner des conférences au Quasar Institute for Advanced Design en devenant coordinateur en 2019. En 2021 et 2022, il a collaboré avec l’Université de Boston pour la réalisation d’ateliers dans les cours de design graphique et de théâtre et la sortie d’une version interactive de la pièce d’Eugène Ionesco « Le roi se meurt » en collaboration avec le réalisateur Clay Hopper le 4 mai 2022. Enfin, en 2022, il réalise sa première cartographie vidéo, projetée à la surface du détecteur de particules Kloe en collaboration avec l‘Institut Nationale de Physique Nucléaire.
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Eva L’Hoest (Liège, 1991, Belgique – vit et travaille à Bruxelles ) explore les façons dont toutes les natures d’images mentales, en particulier le souvenir et la réminiscence, trouvent à se re–matérialiser dans une forme technologique. Elle poursuit avant tout l’exploration de la mémoire et de son infime et étrange réalité subsistante. Pièces après pièces, l’artiste s’approprie les technologies de son contemporain pour révéler à la fois leur nature de prothèses d’appréhension du monde et leur potentiel en tant que médium artistique.
Son travail a été récemment présenté à la quinzième Biennale de Lyon, Lyon (France) curaté par le Palais de Tokyo, la Triennale Okayama Art Summit 2019 “IF THE SNAKE” curaté par Pierre Huyghe, Okayama (Japon), « Suspended time, Extended space » Casino Luxembourg (Benelux), « Fluo Noir » (BIP2018, Liege, BE), « WHSS » (Melange, Koln, DE), Mémoires (ADGY Culture Development Co. LtD., Bejing, CH), Trouble Water (Szczecin Museum, Szczecin, PL), « Now Belgium Now» (LLS358, Antwerp, BE), « Chimera : Marcel Berlanger, Djos Janssens et Eva L’Hoest» (Meetfactory, Prague, CZ), « Marres currents #3:Sighseeing » (Maastricht, NL).
Ses films ont été programmés récemment sous la forme d’une performance à la dernière édition du IFFR à Rotterdam, ImagesPassage à Annecy, le MACRo Museum à Rome, les Rencontres Internationales Paris–Berlin en 2018 ainsi que le Visite Film Festival à Anvers.
Mélodie Mousset (*1981, Abu Dhabi, vit à Zurich) utilise son propre corps pour cartographier, indexer et narrer un « soi » qui semble en métamorphose permanente, lui échappant dès qu’elle cherche à en prendre possession. Elle s’intéresse aux processus d’individuation biologiques, techniques, culturels, individuels et collectifs qui forment le corps. Ces questions anthropologiques et philosophiques prennent forme dans des vidéos, sculptures, installations, performances ou de la réalité virtuelle.
Dans le film Intra Aura Mélodie Mousset entreprend une recherche intense et de longue durée pour approfondir cet intérêt pour le corps, son intériorité phsychique et organique. Elle s’approprie des technologies de visualisation médicales (IRM, impression 3D), les met en rapport avec des rites chamaniques des « curanderos » Mazatèques qu’elle rencontre au cours d’un voyage au Mexique et les combine avec un travail plastique et filmographique.
Avec HanaHana, Mélodie Mousset prolonge cet intérêt pour une narration onirique, une curiosité pour la perméabilité des limites corporelles et un détournement artistique des technologies de pointe. En empruntant la forme du jeu interactif et collaboratif, cette œuvre de réalité virtuelle constitue un environnement fantastique immersif. Chacun.e peut générer des formes et laisser des traces de son passage dans ce désert habité par des sculptures archaïques où fleurissent des mains humaines de toutes tailles et couleurs. Les joueuses et joueurs peuvent se téléporter et multiplier leurs corps à l’extérieur d’eux mêmes et, en version connectée, interagir avec des joueurs qui se trouvent à d’autres endroits. L’espace d’exposition devient ainsi un espace partagé, à la frontière de l’intime et du public, virtuel tout autant que réel.
La combinaison de la musique envoûtante avec l’audio interactif, généré en temps réel par les activités et gestes des joueuses et des joueurs, est également une composante essentielle de cet environnement multi-sensoriel. Dernièrement, Mélodie Mousset fouille particulièrement l’aspect interactif et musical de la réalité virtuelle et cherche à développer un nouveau langage de programmation et d’expérience musicale.
La pratique de Mélodie Mousset s’inscrit profondément dans l’expérience d’un monde contemporain déroutant, défini par ce contraste entre le numérique et le corporel. Avec ses œuvres nous sommes amenés à nous questionner comment se positionnent, dans cet environnement de plus en plus dirigé par les technologies numériques, les corps humains physiques, réels, opaques, vivants, remplis d’organes, porteurs d’une intériorité mentale et psychique, avec des recoins riches d’imagination. Comme le dit l’écrivain et vidéaste américaine Chris Kraus : « Mousset’s associative process is so rich. She fully believes in her own imagination and the logical or alogical digressions that shape an inner life. » (424 mots)
– Claire Hoffmann
Justine Emard (née en 1987) explore les nouvelles relations qui s’instaurent entre nos existences et la technologie.En associant les différents médiums de l’image – photographie, vidéo, réalité virtuelle et performance -, elle situe son travail dans un flux entre la robotique, les neurosciences, la vie organique et
l’intelligence artificielle.
De la création d’un dialogue entre un robot androïde et une psychologue (Erika, film de recherche,2016), à la matérialisation de rêves en impressions 3D (Dance Me Deep, 2020), en passant par une performance avec un moine bouddhiste (Heavy Requiem, 2019), ses œuvres tissent de nouveaux récits, issus d’interactions humains-machines et de l’incarnation de données. Dans Co(AI)xistence (2017), elle met en scène une première rencontre entre deux formes de vies différentes : un danseur/acteur, Mirai Moriyama, et le robot Alter, animé par une forme de vie primitive basée sur un système neuronal, une intelligence artificielle (IA) programmée par le laboratoire de Takashi Ikegami (Université de Tokyo), dont l’incarnation humanoïde a été créée par le laboratoire de Hiroshi Ishiguro (Université d’Osaka).
Grâce à un système d’apprentissage profond, l’IA apprend de l’humain, comme l’humain apprend de la machine, pour tenter de définir de nouvelles perspectives de coexistence. Une esquisse des possibilités du futur apparaît dans Soul Shift (2019) et Symbiotic Rituals (2019), lorsque différentes générations de robots commencent à se reconnaître. Leur apparence minimale autorise une projection émotionnelle, en ouvrant un espace pour l’imagination. Le Japon, que l’artiste a découvert en 2012 et où elle continue de se rendre régulièrement, a sensiblement marqué son travail. Au cours de ses multiples séjours, elle a exploré les connexions entre sa pratique des nouveaux médias et la philosophie japonaise ; en particulier le shintoïsme, qui confère un caractère sacré à la nature. Cette pensée animiste, encore vivace à l’époque des technologies connectées, affleure dans Exovisions (2017), une installation composée de pierres, de bois pétrifiés, d’argile prise dans la roche et d’une application de réalité augmentée. Depuis 2016, elle élabore sa série photographique La Naissance des Robots (2016-2020), dans la perspective anthropologique de l’évolution humaine, entre archéologie du futur et robotique androïde. Depuis 2011, elle montre son travail lors d’expositions personnelles en France, Corée du Sud, Japon, Canada, Colombie, Suède et Italie. Elle participe également à des expositions collectives : 7ème Biennale internationale d’Art Contemporain de Moscou, NRW Forum (Düsseldorf), National Museum of Singapore (Singapour), Moscow Museum of Modern Art (Moscou), Institut Itaú Cultural (São Paulo), Cinémathèque Québécoise (Montréal), Irish Museum of Modern Art (Dublin), Mori Art Museum (Tokyo), Barbican Center (Londres).